Une CMTI ardue et la bataille pour le contrôle d’internet

Les Gouvernements de certains pays autoritaires ont émis des opinions inquiétantes à la Conférence Mondiale des Télécommunications Internationales (CMTI). Mais il faut se méfier du paradoxe de Clinton, car le modèle américain de non-intervention gouvernementale amène son lot de problèmes, selon Alison Powell.

Le futur d’internet serait-il en péril? L’échec des négociations à la CMTI de fin 2012 a été largement commenté et souligne les lignes de démarcation dans la longue lutte sur le rôle des états dans le domaine du contrôle d’accès à internet. Malgré un accord sur une proposition de préambule, le 13 décembre 2012, de nombreux états se sont désolidarisés de cet accord en invoquant que le nouveau traité s’écartait du modèle d’une gouvernance d’internet par des multilatérales.

En surface, le conflit semble opposer liberté et contrôle, ou peu de régulation contre régulations gouvernementales. Est-ce-que les démocraties occidentales, qui souhaitent protéger la liberté d’expression en insistant que les pays ne doivent pas se mêler de la régulation d’internet, régulent la toile? Est ce que les pays comme la Russie, la Chine, et les pays arabes qui souhaitent coordonner la cybersécurité grâce à l’Union Internationale des Télécommunications (UIT) de l’ONU n’en font pas autant?  Selon certains observateurs, des modes de gouvernance sur internet, les choses ne sont pas simples. L’opposition porte sur le paradigme de contrôle non-gouvernemental – pas seulement des états qui souhaitent contrôler les discours dissidents, mais aussi de la part de gouvernements qui craignent que les États-Unis puissent utiliser la gouvernance sur internet comme arme diplomatique.  Cela soulève la possibilité que les citoyens de pays sous le joug des États-Unis pourraient se voir limiter dans l’accès à internet, qu’ils soutiennent la position du gouvernement ou pas.

Pour comprendre les racines de l’opposition au contrôle non-gouvernemental basé dans un seul pays et de voir les défis futurs pour la liberté d’expression sur internet, nous devons regarder le rôle historique des États-Unis dans les arrangements sur la gouvernance d’internet. CINNA, l’ONG dont l’acronyme signifie ‘Corporation Internet pour les Noms et Numéros Assignés’, qui contrôle tous ceux qui peuvent se servir des ‘noms de domaines’, agit sous le contrôle du Gouvernement américain. Même si les actionnaires sont multiples et incluent la société civile, l’industrie et de nombreux gouvernements, l’organisation a été critiquée pour sa façon de se plier aux demandes des plus puissants. Par exemple, un nouveau processus permet aux gouvernements de fournir ‘une mise en garde en avance’ pour les noms de domaines desquels ils se méfient – et le gouvernement a apparemment des problèmes avec les domaines qui se terminent en ‘.sucks’.

Une inquiétude supplémentaire sur le rôle des États-Unis dans la gouvernance d’internet touche à ce qui a été appelé le paradoxe de Clinton: la façon des États-Unis de défendre la liberté sur internet comme une composante de la liberté d’expression, tout en limitant les droits d’accès de certains (souvent ses propres citoyens) au nom d’une forme de protection contre des dangers. Ces pressions affectent tous les pays, mais du fait que nombreuses sont les compagnies internet basées aux États-Unis, elles peuvent parfois avoir des conséquences allant au delà des frontières nationales. Les observateurs dans les pays faisant l’objet de sanctions de la part des États-Unis témoignent qu’ils n’ont pas accès à certains services sur internet. Un commentateur explique que lors de la consultation de simples ‘outils du web’, un message comme celui-ci apparaît: une connexion a été établie entre votre adresse IP et un pays faisant l’objet de sanctions de la part du Gouvernement américain. 

Des observateurs expérimentés d’internet et de ses processus de gouvernance disent que les meetings de l’UIT sont l’une des rares occasions où les nations pauvres peuvent voir leurs intérêts représentés et le seul processus inter-gouvernemental dans lequel ils possèdent un droit de vote. Les discussions à la CMTI et les détails de la proposition de traité sont complexes, et ceux présents aux réunions ont identifié plusieurs raisons à leur échec. L’une fut un échec de procédé où le président de la CMTI abandonna la méthode consensuelle au profit d’un vote. La seconde fut que la syntaxe d’une partie du traité qui était perçue comme excessivement proche d’une régulation du ‘contenu’ d’internet allait ainsi rendre possible le contrôle de leur contenu par les gouvernements.

Ces deux limites, combinées aux négociations de pays tributaires de maigres pedigree sur les Droits de l’Homme revendiquant un droit au contrôle de l’état sur les communications, ont déçus les participants. Tout aussi décevante fut la résolution facultative qui suggérait pour certains que l’ONU devrait assumer davantage de responsabilité dans la régulation d’internet. Pour d’autres, cela n’allait pas assez loin.

Ce qu’il en ressort est un traité signé seulement par certains, mais refusé par la plupart. La majorité des délégations dont les gouvernements incluent des représentants de la société civile n’ont pas signé. La déclaration la plus médiatisée fut celle de l’ambassadeur américain, également connaisseur de l’industrie technologique, Terry Kramer: «Internet a donné au monde des bénéfices économiques et sociaux inimaginables au cours des 24 dernières années; et tout cela sans régulation de la part de l’ONU. Nous ne pouvons pas honnêtement soutenir un traité de l’UIT qui irait à l’encontre du modèle de gouvernance multilatérale d’internet.»

La tentation est de maintenir le statu quo, mais si le modèle de gouvernance multilatérale privilégie certains intérêts et si la concentration de la gouvernance sur internet échue aux États-Unis rend possible «l’interdiction d’accès à des services internet et à l’infrastructure sous la forme d’une pression politique de la part de nations en faveur de la liberté sur internet» – comme l’explique le chercheur en gouvernance sur internet Milton Mueller – alors l’échec ne devra pas simplement être vu comme un affrontement entre ‘l’occident qui embrasse la liberté’ et ‘l’orient autocratique’. Les protecteurs déclarés de la liberté d’expression peuvent avoir des intérêts allant à l’encontre de leur altruisme. Le monde a besoin d’institutions redevables qui transcendent ces conflits d’intérêts. La question de savoir comment atteindre cet objectif demeure ouverte.

Alison Powell est professeure de Médias et Communications à la London School of Economics. Elle est membre du Réseau Européen d’Excellence en Sciences de l’Internet et du groupe de conseil de l’organisation ‘Open Rights Group’.

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Commentaires (3)

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  1. Having once again having read though this article and the comments; I have reflected on one or two interesting points. I should make it clear at this point; I have only a basic users knowledge of computers and even less of telecommunications. I also have only the rudiments of a basic education. However I have sometimes miraculously excelled at understanding things, purely because I’m familiar with skulduggery and recognize there’s a measure of such ingrained within controls of the internet. I am a human rights and other issue campaigner/lobbyist and have come across many issues that involve the internet in some way. Most will remember the five Muslim men extradited to the United States; two of them were said to have maintained a web site where certain people supported the Mujaheddin in there struggle against the Soviet Army, that had invaded Afghanistan. I remember watching a ‘Rambo’ film about this with the Mujaheddin portrayed has heroes. The British Government along with the US Government clearly supported this action and the US gave money and arms. When 9/11 came along the US and UK carried out sweeping betrayals, integrated with many proxy arrests, on a cash for criminals, big money paid and anything accepted basis. These two will most probably spend life in solitary confinement without parole. The public do not know much about this and so do not have an opinion. Whilst this has been in the news, and they read whatever the stance of the paper they read at the time told them. All this may seem like a pointless rant from the local nutter, until one considers the other side of things. What else can be found on the web concerning these issues. Six weeks ago I watched a video from Iraq said to be a « Cops with Cameras » type video. ‘Said to be’ taken in secret by a whistleblower this showed American private contract policemen, getting drunk smashing up as much government property as possible. Drunken driving, ramming cars, threatening bystanders and so fourth. I could only put this down as a ‘conspiracy theory’ video, because there was no evidence otherwise. I have seen many videos on the internet that the sender will claim to be absolute proof of whatever they claim it to be; whilst there’s proof of nothing. From the many I’ve seen from Iraq and elsewhere some of even the most bizarre murder videos, have gained believably. Commenting on such material is always an invidious situation; the videos may be contentious, but money matters are the same everywhere. People want to be paid; so I keep my eye on the money. I printed a copy of the claim for all the damage in a court case in the US, the vid is genuine. I’ve no doubt things are the same across the world, with the desire of Governments and authorities to control what is on the internet; but I believe they do an amazing job of controlling the people generically, and without the people knowing. I suppose we live in a sea of propaganda; but not in the format people see in spy movies, with one central control point and one fixed purpose. It is very ‘broad spectrum’ and we are perpetrators not just victims, once without really knowing it.

  2. Unfortunately it seems the negotiations are going as feared, we have the predictable « good vs evil » power show. On one side the more overtly dictatorial nations, China, Russia, openly demand high levels of surveillance and restriction. On the other, America, The UK, stand valiant and strong, « defending our freedoms » as they so often claim.

    Of course this is an illusion. If you study the changes to legislation made in western nations over the last three decades, you will become keenly aware of a trend. If you believe a country is truly ruled by its laws then the gradual deterioration of rights and individual powers would leave the logical observer with an impression of our systems as very similar to the Chinese or Russian. The key difference is in the level of utilisation of that legislative power. Ultimately however the goals at meetings such as this will essentially be the same regardless of the nation.

    What i predict is a loud fuss over key issues followed by a quiet « compromise » in which only a fraction of the specifics are discussed openly. The loudest and most prominent from the west and the most silent and discrete from the east will be the writers of our internet future, so currently that is in the hands of America and China. Surely, regardless of the form it takes, we all know whats coming don’t we?

  3. I am afraid I know very little about the internet or telecommunications in general; I just manage to learn enough to basically use the stuff we have today. Perhaps that puts me at a serious disadvantage; being the dumb person who has no specialist knowledge. Well OK, I’ll leave all the highly technical stuff to others, step far back and look at the long view, the generic one. I would like to try to contribute this way. There some things that come into my mind, though in a jumbled way. First we must think of what the internet may become as time passes, rather than in a fixed way. We need also to try to perceive its total value, considering its diversity and the diversity of those who may use it. We must beware of deeply flawed thinking; even from those with seemingly impeccable education and technical knowledge. The current economic downturn will sharpen minds and make governments and business more ruthless. I believe every attempt will be made to cloud the judgment of the public in general. War on Terror methods may be used, certainly those involved in the the war on terror will be at be forefront of everything. This is a very big issue; control of the internet would be a key part of total control and management of more or less everything. The common people would be made to believe this was their idea. What I believe we need is the greatest amount of internet freedom possible; restricting only that which does undue harm to others. I believe there is a genuine need to protect the public from harm, by those who would be considered criminals, on or off the web. However any restrictions to serve this agenda, should not be disingenuous or in itself a threat.

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Le Débat Sur La Liberté d'Expression est un projet de recherche du Programme Dahrendorf pour l'étude de la liberté au Collège St Anthony, Université d'Oxford.

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