Faîtes attention à ce que vous re-tweetez aux Philippines

Une nouvelle loi contre la cyber-criminalité donnerait des pouvoirs sans limites à l’état pour suivre les usagers d’internet, fermer des sites web et emprisonner des citoyens, selon Purple S. Romero.

Les philippins sont rapidement en train de devenir accrocs aux médias sociaux. Les Philippines ont récemment été classées comme 10ème plus grande nation d’utilisateurs de Twitter dans le monde avec 9.5 millions de membres, selon l’observateur de médias sociaux Semiocast. Vingt-sept millions de philippins sont sur Facebook mais le décret pour la Prévention de la Cyber-criminalité de 2012 présente des provisions dont les critiques évoquent la possibilité de censure et de violation de la liberté d’expression – un développement qui déçoit dans un état démocratique qui possède une communauté grandissante et active sur les médias sociaux.

Une des provisions les plus problématiques du décret pour la Prévention de la Cyber-criminalité est sa pénalisation de la diffamation électronique. La sanction criminelle pour diffamation aux Philippines, selon un communiqué du Comité des Nations Unies pour les Droits de l’Homme en 2011, «constitue une restriction illégale du droit à la liberté d’expression». En tant que telles, les lois vont à l’encontre du Traité International sur les Droits Civils et Politiques, dont les Philippines sont signataires.

L’argument principal contre une pénalisation excessive de la diffamation, selon plusieurs groupes de médias, est le suivant: être emprisonné pour quelque chose que l’on a écrit (ou dans le cas de la calomnie, prononcé) provoque un effet de crainte qui décourage les reportages critiques et les points de vue variés.

La loi contre la cyber-criminalité ne renforce pas seulement le traitement de la calomnie comme un crime mais aussi sa pénalisation qui s’est vu augmentée. La section 6 du décret pour la Prévention de la Cyber-criminalité énonce que la peine imposée «sera d’un degré supérieur à celle prévue dans la révision du Code Pénal.» Sous le Code Pénal révisé, la calomnie était passible d’emprisonnement entre 6 mois et 4 ans; sous le décret pour la Prévention de la Cyber-criminalité, le temps d’emprisonnement devient de 6 à 12 ans.

L’amendement sur l’augmentation des peines pour les crimes sur internet fut retirée dans la version de la loi présentée au Parlement puis réintroduite par le Sénat (les Philippines ont un système bicaméral et une proposition de loi peut émaner de la chambre des représentants comme du Sénat).

Le public, lui, fut ignoré tout au long de cette affaire.

Pourquoi la calomnie électronique devrait-elle être sujette à des peines plus lourdes que celle de la calomnie ordinaire? Le sous-secrétaire du Ministère de la justice Geronimo Sy dit que c’est parce qu’internet permet la dissémination d’informations calomnieuses plus rapidement et à un public plus large. Un click suffit à causer des dommages à la réputation d’un individu.

Pendant les arguments oraux de la Cour Suprême du 15 janvier, un des juges évoqua qu’un usager de Twitter peut tout autant détruire la réputation de quelqu’un puisqu’un seul tweet peut être vu par des centaines de milliers et même des millions de ‘followers’. La protection de citoyens privés est donc considérée comme une des responsabilités principales de l’État.

Le langage de la loi demeure néanmoins vague quant à l’identité de celui qui peut être tenu responsable de calomnie électronique. A l’inverse de la calomnie ordinaire, qui précise l’étendue de la culpabilité (de l’auteur ou journaliste à l’entité qui la publie), la calomnie électronique est entourée d’ambiguïté. Des questions ont notamment été soulevées concernant ceux qui re-tweetent ou re-publient un statut Facebook et la possibilité que ces derniers soient poursuivis pour le même crime.

Certaines garanties contre cela ont été données. Sy expliqua qu’il ne serait pas possible pour les juges d’instruction de retrouver, interroger et arrêter chaque personne qui aurait re-tweeté, en ajoutant que les autorités se préoccuperaient seulement de la source. Néanmoins, les développements qui s’ensuivirent laissent planer le doute sur cette déclaration.

Les autres provisions de la loi qui donnent au Gouvernement un droit de contrôle sur l’information sont dans la section 19 ou la ‘clause de retrait’ qui autorise le ministère de la justice à restreindre l’accès aux sites internet qui contiennent des contenus dommageables basés sur les premiers éléments disponibles.

Le Gouvernement a fait machine arrière à ce sujet et déclara que cette provision serait rendue nulle parce qu’elle constitue une restreinte préalable.

Le fait que le président ait signé une loi contenant une provision que son propre Gouvernement déclara inconstitutionnelle par la suite ne fait qu’accentuer les doutes concernant la façon dont cette loi fut élaborée.

Une étude sur les délibérations du Congrès philippin sur cette loi montre que les provisions mentionnées ci-dessus furent passées en l’absence de débat. La provision concernant la calomnie électronique, par exemple, fut ajoutée au cours d’une seule session plénière.

Des considérations sur les aspects distincts et le type de communication en ligne n’ont pas été adressées, les détails n’ont pas été discutés et les principaux experts n’ont pas été consultés.

Comme exemple du dommage causé par un manque de débat sur ce problème, on peut citer le peu de discussion sur ce qui rend un contenu ‘dommageable’. La seule objection soulevée sur ce problème fut que les autorités pourraient déformer ce qui est pornographique et ce qui ne l’est pas mais les critiques de la législation sur le crime en ligne relèvent que les autorités et représentants officiels pourraient aussi considérer des critiques du Gouvernement comme ‘contenu dommageable’.

Si la loi est validée, les autorités pourront s’approprier les données du trafic sur internet en temps réel sans avoir besoin d’un mandat délivré par un tribunal. Les données du trafic sous cette loi englobent ‘toute donnée informatique autre que le contenu de la communication elle-même et, entre autres, l’origine de la communication, la destination, le chemin utilisé, l’heure, la date, la taille, la durée et le type de medium employé.’

Sy dit que la provision est utile pour suivre les courriels et messages textes envoyés par des suspects terroristes mais comme la collecte des données ne nécessite pas de mandat, le spectre de l’abus plane sur le pays. Au cours des arguments oraux le 15 janvier un autre juge commenta que la loi n’expliquait pas comment des citoyens ordinaires pourraient vérifier si les autorités ne faisaient que collecter des données du trafic et n’étaient pas aussi en train d’éplucher le contenu de courriels, messages textes, etc.

La Cour Suprême a empêché le Gouvernement de mettre en vigueur la loi sur la cyber-criminalité. Malgré cela, le contrôle de ce dernier sur la liberté d’expression n’a pas diminué. L’activiste anti-mine Esperlita Garcia a été arrêtée depuis, à la suite d’une publication sur Facebook qu’elle a faite au sujet de la répression d’une manifestation en octobre 2012.

Un chef de police a aussi ‘invité’ des gens à un bureau de police à la suite de leurs critiques de l’échec des forces de police contre le nombre de vols commis. Aucun des sept individus convoqués ne s’est présenté. Le super-intendant Rico Tome dit que la police souhaite simplement leur rappeler que leurs remarques diffamatoires sont punissables.

La loi contre le cyber-crime n’a même pas été invoquée au cours de ces incidents – la loi actuelle contre la calomnie s’est révélée suffisante pour expliquer leurs actions. Les conséquences des lois existantes sur la calomnie font froid dans le dos et empêchent le public de faire confiance à l’État pour qu’il n’abuse pas du décret sur la Prévention de la Cyber-criminalité. Le problème de la loi sur le cyber-crime va plus loin que le décret lui-même. Ses faiblesses sont synonymes d’un processus législatif qui exclut l’idée d’un débat, d’une recherche honnête et d’un mécanisme pour recevoir des remarques et critiques qui pourraient rendre à cette loi son objectif premier, celui d’être un outil contre le piratage sur internet, la pornographie en ligne et l’usurpation d’identité.

Du fait de l’absence de transparence et d’inclusion dans l’écriture de la loi contre le cyber-crime, il existe également des doutes sur sa capacité à être appliquée correctement, et si elle était mise en pratique, que les droits seraient respectés et que les règles de procès équitables seraient suivies. L’absence de la voix du public dans le processus d’écriture de la loi créé une atmosphère de peur. Les gens disent que cela mènera à une ‘loi martiale sur internet’, un retour aux temps où la liberté de s’exprimer contre ceux au pouvoir était durement réprimée. Néanmoins, comme cela se passa en 1986, les philippins se battront pour leur droit à parler librement. Ils ne pourront être contraints au silence, que ce soit dans le monde réel ou le monde virtuel.

Purple S. Romero est un journaliste multimédia pour Rappler.com basé à Manille.

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Commentaires (1)

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  1. We are three high school students in eleventh grade taking a course called “Language and Literature;” in this course explore taboo and hate speech. We were asked to read a discussion article on “www.freespeechdebate.com,” and this discussion intrigued us the most
    What we understood of your argument was that you are antagonistic towards the Philippine’s new Cybercrime Prevention act of 2012; that the Philippines’ government is given unrestrained powers in order to detect internet users. Section 6 of the new Cybercrime Prevention Act, the consequence of libel can result in imprisonment of between six and twelve years, while before it was six months and four years. We agree that six months to four years is far too strict of a punishment. Even though, in the Philippines freedom of speech has allowed, the citizens have no say in the laws. There is no consensus in the Cybercrime Prevention Act in the Philippines with the people and the government.
    The ‘Cybercrime Prevention Act of 2012’ is mainly about treating all cyber crimes on the same level. For example the way pornography is treated is the same for one single twitter user posting against the government or authority. On January 15th of 2013, the Supreme Court stated that twitter users can easily destroy the reputation of any individual, and that those individuals should be punished. Geronimo Sy from the Department of Justice states otherwise, that it would be most likely impossible to track down single individuals who are out to harm. Agreeing to this, we believe in freedom of speech. Freedom of speech was given to Filipinos only twenty-eight years ago. This makes it look like taking away freedom of speech on the internet would be a substandard idea.
    As of our opinion toward how the Philippine government on how they are trying to solve the internet usage, we believe that the government is approaching the situation in the wrong way. In comparison to Europe, new tough cyber laws have been passed by the EU ruling that hackers and cyber attackers will face at least two years of prison in the future. This generally sounds less serious than the punishments in the Philippines, but the EU dedicates research to investigate major attacks and to correctly punish cybercrime, individuals or groups so they are given the correct punishment and their imprisonment depends on the seriousness and damage of the crime. Five year imprisonments are given to attacks to “critical infrastructure,” such as power plants, transport networks and government networks, and the same applies if an attack is committed by a criminal organisation.
    We understand your strong opinion towards the Filipino laws on cyber crime, but the country we live in (The Netherlands) is known for its tolerance in free speech, however it also has an organization and laws about this topic. For instance, Dutch minister of security and justice Ivo Opstellen proposed empowering Dutch law enforcement to access and control the computers of suspected cyber criminals, even if those computers are outside of the Netherlands. The “Nationaal Cyber Security Centrum” has a few responsibility to continuously watch suspect sources on the internet and warn them if they commit a crime. They also organize advertisements on how to protect yourself from digital dangers.
    In comparison to The Philippines, The Netherlands, cybercrime is addressed differently and perceived less strictly.
    The point that we are trying to make is that it is vague and unclear how the Filipino government and police are identifying what a cybercrime is and what can be considered “criticizing” on the internet.

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