Eatock vs Bolt: un cas australien de discours de haine

Max Harris explique comment le journaliste Andrew Bolt a enfreint la loi australienne portant sur la discrimination raciale avec son article sur les «aborigènes à la peau pâle».

Exposition des faits

En août 2009, le journaliste australien Andrew Bolt a publié plusieurs articles et blogs pour le journal australien Herald Sun affirmant que certains aborigènes à la peau pâle se présentaient comme aborigènes pour pouvoir obtenir des avantages politiques ou financiers. Pat Eatock, l’une des femmes visées par ces articles, arguait devant le Tribunal fédéral d’Australie que ces articles constituaient une offense basée sur la race contrevenant ainsi à la Loi australienne sur la discrimination racial de 1975.

Le juge dans cette affaire, Bromberg, a précisé, dans un jugement de pas moins de 470 paragraphes qui peut être lu ici, que deux valeurs sous-tendaient la section 18 de la Loi sur la discrimination raciale: le besoin des Australiens de vivre libres de tout mal causé par un préjudice racial et la liberté d’expression.

Au moment d’appliquer la loi aux évènements récents, le juge Bromberg a fait remarquer que pour qu’il s’agisse «raisonnablement» d’une offense à caractère racial il fallait qu’il y ait des chances réelles (et non lointaines ou fantaisistes) qu’une personne ou un groupe soient offensés, intimidés, insultés ou humiliés. Il a déclaré que les articles insinuaient que les individus s’identifiaient en tant qu’aborigènes pour des raisons activiste ou politique mais que ces individus n’étaient en fait pas véritablement aborigènes. Ceci pouvait très bien être une affirmation véridique, qui pourrait mener certains membres de ce groupe à ne pas exprimer leur identité. Ainsi, le juge Bromberg a constaté qu’au moins une partie du groupe pouvait raisonnablement se sentir offensée.

La protection du commentaire juste exigeait que Bolt et le Herald Weekly Times (l’éditeur du journal) agissent raisonnablement et de bonne foi, en faisant des commentaires basés sur des faits réels. Mais le juge Bromberg a constaté qu’il y avait des inexactitudes factuelles dans l’article. Il a reconnu que la liberté d’expression incluait le droit de parler de façon offensante, toutefois, le langage utilisé dans ce cas était enflammé, provoquant et cynique. Quant à la défense de l’activité expressive pour le but véritable de l’intérêt public, la section 18D, la cour a constaté que le journaliste était allé bien au-delà de ce qui était nécessaire pour prouver son propos. En conséquence, le juge a convenu qu’il était approprié de déclarer les articles comme étant illégaux, tout en refusant d’autres peines comme exiger que les articles soient retirés du site internet. Aucun dommage n’a été attribué.

L'avis de l'auteur

Cette décision était controversée, comme le montrent les réponses publiées dans un article par une agence média australienne, ABC, et un autre publié dans le journal The Australian.  Par ailleurs, en 2014, le Gouvernement australien fraîchement élu, dirigé par Tony Abbott, promettait d'abroger les dispositions de la Loi sur la discrimination raciale sur laquelle Eatock se basait. Mais la décision du juge Bromberg représente une application réfléchie et sensible de la loi.  Il a démêlé des concepts difficiles tels que la race et l'offense, et il a offert des réflexions nuancées sur le multiculturalisme et la liberté d'expression.  En accordant des réparations, il a ménagé une certaine marge de manoeuvre pour la liberté d'expression, sans insister sur des excuses et en notant qu'à l'âge de l'internet, il serait futile d'exiger le retrait du contenu d'un site internet. Ceci devrait également nous rappeler que dans un jugement, c'est souvent la décision finale, plus que le raisonnement, qui crée une différence pour la liberté d'expression réelle.

- Max Harris

Lire davantage:


Commentaires (1)

Les traductions automatiques sont fournies par Google Translate. Elles vous donneront une idée générale au sujet du contenu mais ne peuvent pas rendre compte de façon précise et nuancée des propos de l'auteur. Veuillez vous en souvenir lorsque vous les utilisez.

  1. I agree that it seems a reasonable and nuanced decision, but I don’t understand how he can say the article was unlawful and yet it can remain on the newspaper’s website, presumably. I’m not a lawyer, but that seems like saying the thief’s a thief but he can keep the stolen goods…

Faire un commentaire dans n'importe qu'elle langue

Dossiers

Faire glisser vers la gauche pour faire apparaître tous les points forts


Le Débat Sur La Liberté d'Expression est un projet de recherche du Programme Dahrendorf pour l'étude de la liberté au Collège St Anthony, Université d'Oxford.

L'Université d'Oxford